Questions-réponses : sérologie et COVID-19

9 juin 2020 | Q&A

L’identification de tout nouvel agent pathogène, comme le virus de la COVID-19, s’accompagne de nombreuses inconnues, en particulier quant à sa capacité à se propager dans la population et à sa virulence. Les premières stratégies de surveillance sont principalement axées sur l’utilisation des tests moléculaires (RT-PCR) pour détecter l’infection aiguë chez les patients atteints d’une maladie grave, car ce sont eux qui ont besoin de soins et qui en demandent. Ainsi, les sujets atteints d'infections bénignes ou asymptomatiques pour lesquels une prise en charge médicale n'est pas nécessaire ne sont pas toujours repérés et on ne connaît donc pas toute l'étendue de la maladie. Les réponses aux questions ci-dessous sont basées sur notre connaissance actuelle du virus de la COVID-19 et de la maladie qu’il provoque. L’OMS continuera de mettre à jour ces réponses au fur et à mesure que de nouvelles informations seront disponibles.

Les tests sérologiques mesurent la réponse en anticorps chez un individu.  La production d'anticorps anti-COVID-19 dure plusieurs jours à plusieurs semaines après l’infection par le virus. La présence d’anticorps indique que le sujet a été infecté par le virus de la COVID-19, quelle que soit la gravité des symptômes, ou même en l'absence de symptômes.

Des études séro-épidémiologiques sont menées dans le cadre de la surveillance de la COVID-19 pour mesurer l’étendue de l’infection parmi les personnes qui ne se sont pas fait soigner et qui n'ont pas été repérées à l'aide des moyens de surveillance actuels parce qu’elles étaient asymptomatiques ou ne présentaient que des symptômes bénins. Dans le cas d'un nouveau virus, y compris le virus de la COVID-19, la séroprévalence initiale dans la population est supposée négligeable, du fait de l'origine nouvelle du virus. Par conséquent, la surveillance de la séropositivité aux anticorps dans une population peut permettre de tirer des conclusions sur l'étendue de l'infection et sur l'incidence cumulée de l'infection dans la population.

Les tests moléculaires, ou tests PCR, détectent le matériel génétique du virus et permettent donc de déterminer si une personne est actuellement infectée par le virus de la COVID-19 (SARS-CoV-2). La séquence génomique complète du virus a été communiquée par les autorités chinoises au début du mois de janvier, ce qui a permis à de nombreux laboratoires de mettre au point des tests PCR qui sont maintenant utilisés pour détecter des cas dans le monde entier. 

Les tests sérologiques détectent les anticorps contre le virus, et permettent donc de déterminer si une personne a été infectée par le virus de la COVID-19 récemment (IgM) ou il y a plus longtemps (IgG). Les tests sérologiques ne servent pas à diagnostiquer l’infection aiguë par le virus de la COVID-19.

Non - À l’heure actuelle, aucune étude n’a permis de déterminer si la présence d’anticorps anti-SARS-CoV-2 confère une immunité contre une nouvelle infection par ce virus chez l'être humain.

Le développement d’anticorps contre un agent pathogène à la suite d'une infection naturelle se déroule en plusieurs étapes et dure généralement une à deux semaines, mais la réponse immunitaire complète est parfois plus longue. La plupart des études sur la présence d’anticorps anti-COVID-19 menées à ce jour montrent que les personnes qui ont guéri de l'infection possèdent des anticorps contre le virus. Toutefois, chez certains d’entre elles, les concentrations sanguines d’anticorps neutralisants sont très faibles.

L’OMS fournit aux professionnels de la santé publique et aux chercheurs une plateforme mondiale sur le recours à la sérologie à des fins de santé publique et de recherche dans le cadre de la COVID-19.

L’OMS collabore avec des laboratoires et avec FIND afin de mettre au point de nouveaux tests sérologiques pour la COVID-19 et d'évaluer et de valider ceux déjà disponibles. Il existe actuellement plusieurs centaines de tests immunologiques commercialisés pour la COVID-19, y compris des titrages avec un immuno-absorbant lié à une enzyme (ELISA), des tests de diagnostic immunologique rapide (RDT) et des plateformes automatisées à haut débit. Les premières données de validation concernant les tests ELISA et les RDT ont été publiées, mais les résultats sont basés sur des ensembles de données limités, qui n'ont pas tous été obtenus avec des échantillons bien caractérisés de patients atteints de la COVID-19. Des laboratoires ont également mis au point des tests de neutralisation qui nécessitent des installations de biosécurité de niveau 3. 

Dans le cadre de l'essai mondial Solidarity II, l’OMS collabore avec des partenaires pour accélérer la mise au point et le partage mondial de batteries de sérums bien caractérisées afin de permettre la standardisation des tests sérologiques dans le monde entier et de mettre au point des tests sérologiques standardisés à l’intention des collaborateurs.  

En outre, l’OMS, en collaboration avec des partenaires techniques, a adapté les premiers protocoles d’enquête épidémiologique sur la COVID-19 à partir de ceux qui existent pour la grippe pandémique et le MERS-CoV afin de mieux comprendre ces caractéristiques et comment elles peuvent permettre définir les mesures de santé publique. Il s'agit des études Unity et l’OMS collabore actuellement avec plus de 40 pays pour les mettre en œuvre :

• Premiers X cas et contacts
• Enquête séro-épidémiologique auprès des agents de santé sur les facteurs de risque d’infection
• Étude auprès des ménages sur la transmission
• Étude sérologique en population, stratifiée par âge

Les résultats des enquêtes séro-épidémiologiques, pris individuellement ou regroupés pour plusieurs sites ou pays étudiés, aideront à comprendre les principales caractéristiques cliniques, épidémiologiques et virologiques du virus de la COVID-19, et à établir des estimations solides, en s’attachant aux aspects suivants :

• Principaux paramètres épidémiologiques, y compris : taux d’infections secondaires et taux d’attaque clinique secondaire de l'infection par le virus de la COVID-19 chez les contacts proches, fraction asymptomatique de l’infection, intervalle sériel et période d’incubation de la COVID-19, taux de reproduction de base (R0) et taux de reproduction effectif (Re) du virus de la COVID-19.
• Tableau clinique de la COVID-19 et évolution de la maladie associée. 
• Facteurs de risque de transmission et d’infection, et identification des voies de transmission possibles.
• Impact des mesures de lutte anti-infectieuse dans les établissements de soins.
• Réponse sérologique après une infection symptomatique par le virus de la COVID-19.
• Séroprévalence du virus de la COVID-19, stratifiée par âge. 
• Incidence cumulée de l’infection, y compris étendue de l’infection par âge. 
• Taux de gravité de l’infection par le virus responsable de la COVID-19 et de la maladie associée (par exemple, le taux d’hospitalisation et le taux de létalité).

L’OMS est régulièrement en contact avec les pays qui mettent en mènent des études Unity, qui participent à l’étude Solidarity II ou qui mènent des études séro-épidémiologiques suivant leurs propres protocoles. Nous avons mis en relation nos partenaires dans les pays afin qu'ils mènent des études, qu’ils fassent part de leurs expériences, de leurs difficultés et de leurs réussites et qu'ils examinent les résultats au fur et à mesure qu’ils seront disponibles. 

Les premiers résultats des études sérologiques en population sont maintenant disponibles, et d’autres résultats sont attendus au cours des semaines à venir.

Dès que les premiers résultats seront disponibles, il est important de savoir quelle population a participé à l’étude, quels échantillons ont été testés, comment et quand les échantillons ont été prélevés, quels tests sérologiques ont été utilisés et comment les auteurs ont interprété les résultats.  

À l’heure actuelle, la principale incertitude reste la performance des tests sérologiques en termes de sensibilité et de spécificité. En outre, ces tests devraient aussi permettre d’évaluer la réactivité croisée avec d’autres coronavirus, tels que les coronavirus humains, le SARS-CoV et le MERS-CoV, et la corrélation avec l’immunité protectrice (protection contre la réinfection).

Les premiers résultats obtenus en Allemagne, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, en France, au Danemark, aux États-Unis d’Amérique, en Suisse, en Finlande, au Japon, en Italie, en Chine, en Espagne, au Brésil, en Croatie, en Andorre et au Luxembourg ont montré que, pour la plupart des populations étudiées, l’étendue de l’infection est inférieure à 10 %, sauf pour : une étude allemande (14 %), un rapport sur les secouristes de l’État de New York (10-17 %), deux prépublications scientifiques de Trieste, en Italie (17,2 %), et des donneurs de sang et des enfants à Londres (11,3 %). Quatre publications revues par un comité de lecture sont maintenant disponibles en ligne : une concernant des patients qui ne sont pas atteints de la COVID-19 à Wuhan (Chine),  une à propos d'établissements communautaires et hospitaliers dans différentes régions de Chine,  une concernant la population générale à Boise, dans l'Idaho, et une portant sur les résidents de Hong Kong.  Les autres études n’ont pas encore été revues par un comité de lecture et certaines ne sont disponibles que sur des serveurs de prépublication ou sont rapportées succinctement dans des communiqués de presse. 

Ces résultats seront actualisés à mesure que de nouvelles données seront disponibles. L’OMS n’a pas encore examiné en détail les résultats de chaque étude car les articles complets ne sont pas encore disponibles.


[1] Wu X, Fu B, Chen L, Feng Y. Serological Tests Facilitate Identification of Asymptomatic SARS-CoV-2 Infection in Wuhan, China. J Med Virol 2020;10.1002/jmv.25904. 

[2] Xu X, Sun J, Nie S et al. Seroprevalence of Immunoglobulin M and G Antibodies Against SARS-CoV-2 in China. Nat Med 2020. doi: 10.1038/s41591-020-0949-6.

[3] Bryan A, Pepper G, Wener M et al. Performance Characteristics of the Abbott Architect SARS-CoV-2 IgG Assay and Seroprevalence in Boise, Idaho. J Clin Microbiol 2020;JCM.00941-20. 

[4] To KK, Cheng V, Cai JP et al. Seroprevalence of SARS-CoV-2 in Hong Kong and in residents evacuated from Hubei province, China: a multicohort study. Lancet doi: 10.1016/S2666-5247(20)30053-7.

[5] Wu X, Fu B, Chen L, Feng Y. Serological Tests Facilitate Identification of Asymptomatic SARS-CoV-2 Infection in Wuhan, China. J Med Virol 2020;10.1002/jmv.25904.  

[6] Xu X, Sun J, Nie S et al. Seroprevalence of Immunoglobulin M and G Antibodies Against SARS-CoV-2 in China. Nat Med 2020. doi: 10.1038/s41591-020-0949-6.

[7] Bryan A, Pepper G, Wener M et al. Performance Characteristics of the Abbott Architect SARS-CoV-2 IgG Assay and Seroprevalence in Boise, Idaho. J Clin Microbiol 2020;JCM.00941-20. 

[8] To KK, Cheng V, Cai JP et al. Seroprevalence of SARS-CoV-2 in Hong Kong and in residents evacuated from Hubei province, China: a multicohort study. Lancet doi: 10.1016/S2666-5247(20)30053-7

Les résultats des premières études séro-épidémiologiques, compte tenu des limitations décrites ci-dessus, indiquent que, jusqu'à présent, peu de gens sont infectés.  Ceci semble montrer que de nombreuses personnes restent sensibles à l’infection. C'est une information importante pour la planification en cas de résurgence ultérieure de l’infection.

L’immunité collective est la protection indirecte contre une maladie infectieuse qui existe lorsqu’une population est immunisée grâce à la vaccination ou à l’immunité développée lors d'une infection antérieure. Cela signifie que même les personnes qui n’ont pas été infectées ou chez qui une infection n’a pas déclenché de réponse immunitaire sont protégées parce que les personnes immunisées peuvent agir comme « bouclier » face aux sujets infectés. On ne connaît pas encore exactement le seuil à atteindre pour obtenir l’immunité collective contre la COVID-19. 

 

Certains gouvernements ont suggéré que la détection des anticorps contre le SARS-CoV-2, le virus à l’origine de la COVID-19, pourrait servir à établir un « passeport d’immunité » ou un « certificat d’absence de risque » permettant à leur titulaire de voyager ou de retourner au travail en supposant qu’il est protégé d’une réinfection. À ce stade de la pandémie, on ne dispose pas d'assez de données sur l’efficacité de l’immunité adaptative pour garantir la pertinence d’un « passeport d’immunité » ou d’un « certificat d'absence de risque ». Autrement dit, rien ne prouve que les sujets qui ont guéri de la COVID-19 et qui ont développé des anticorps sont protégés en cas de réinfection.

Le point de vue de l’OMS sur l’utilisation d’un « passeport d’immunité » dans le cadre de COVID-19 est exposé dans le document disponible ici : https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/331904/WHO-2019-nCoV-Sci_Brief-Immunity_passport-2020.1-fre.pdf.