Emmanuel Macron adore ses téléphones portables. Pour le président français, ils sont un outil de travail, un moyen de gouverner et même un symbole de sa modernité. Deux iPhone trônent à ses côtés sur son portrait officiel et, dans la vidéo tournée en mai avec les youtubeurs McFly et Carlito, on le voit dans les salons de l’Elysée en train d’en dégainer un pour appeler le footballeur Kylian Mbappé.
Mais l’utilisation de ces appareils s’est peut-être retournée contre lui. L’un des numéros du président de la République, qu’il utilise, selon nos informations, régulièrement depuis au moins 2017 et jusqu’à ces derniers jours, figure dans la liste des numéros sélectionnés par un service de sécurité de l’Etat marocain, utilisateur du logiciel espion Pegasus, pour un potentiel piratage. Des numéros de téléphone appartenant à Edouard Philippe, alors premier ministre, ainsi qu’à quatorze autres membres du gouvernement ont également été visés.
Ces numéros de téléphone font partie d’une liste en comptant plus de 50 000, consultée par l’organisation Forbidden Stories et Amnesty International avant d’être partagée avec seize médias, dont Le Monde, réunis au sein du « Projet Pegasus ». Selon les analyses menées par le consortium et Amnesty International, la présence d’un numéro dans cette liste signifie qu’un client de Pegasus s’y est intéressé et a envisagé une possible infection.
L’authenticité de cette liste et son lien avec le logiciel espion Pegasus ont notamment été établis en analysant plusieurs dizaines de téléphones dont les numéros y figurent. Dans une grande majorité de cas, des traces techniques laissées par Pegasus y ont été trouvées, souvent quelques secondes après l’apparition sur la liste du numéro de téléphone correspondant.
Faute d’avoir pu examiner le téléphone du président de la République, il n’est pas possible de dire s’il a été infecté par ce logiciel espion, l’un des plus sophistiqués de la planète. Pegasus est aussi invisible qu’intrusif ; seul un protocole d’analyse technique précis, établi par une poignée d’experts, permet d’en déceler des traces a posteriori. Dans un communiqué transmis au « Projet Pegasus » le 20 juillet, NSO Group affirme qu’Emmanuel Macron « n’a pas, et n’a jamais été une cible ou n’a jamais été sélectionné comme une cible par des clients de NSO ». L’entreprise israélienne n’indique pas sur quoi elle se base pour l’affirmer, mais précise qu’elle n’a « pas accès aux données de ses clients, qui doivent toutefois [lui] fournir ce type d’informations » en cas d’enquête.
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